Khartoum, autrefois ville animée et vibrante, s’est transformée en une capitale fantomatique depuis le déclenchement de la guerre civile qui ravage le pays depuis la mi-avril 2023.
Les rues, jadis pleines de vie, sont aujourd’hui désertes, marquées par la destruction et la peur.
« Ce que j’ai vu à Khartoum était effroyable. C’est une ville dévastée, devenue une cité fantôme », a déclaré Edem Wosornu, responsable au Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), après une visite sur place.
Intervenant par visioconférence depuis Port-Soudan, le 9 août, elle a confié n’avoir jamais été témoin d’une telle situation en près de 25 ans de carrière humanitaire, pourtant marquée par des missions dans plusieurs zones de conflit.
Ancienne membre de l’OCHA au Soudan il y a vingt ans, elle raconte que son équipe et elle n’ont pas pu accéder aux bureaux de l’organisation dans la capitale en raison de la présence d’engins explosifs non détonés.
Les opérations de déminage sont toujours en cours. Wosornu rappelle que 30 millions de Soudanais ont aujourd’hui besoin d’aide, et qu’il suffirait de « 55 centimes par jour et par personne » pour apporter un soutien vital, à condition de pouvoir accéder aux zones concernées en toute sécurité et avec les ressources nécessaires.
Khartoum, une capitale transformée en cimetière
Depuis que l’armée soudanaise a annoncé en mars avoir repris le contrôle de Khartoum, de graves exactions ont été commises, qualifiées de crimes de guerre par des rapports des Nations unies.
D’après ces documents, l’armée et des milices islamistes alliées ont procédé à des exécutions sommaires après la reprise de la ville.
Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est dit « horrifié » par les témoignages et vidéos montrant des civils tués de sang-froid, souvent en public, par des hommes en uniforme ou en civil.
Au moins 20 civils, dont une femme, auraient été exécutés dans le secteur de Sud al-Hizam, au sud de Khartoum, par l’armée et ses alliés.
Une « opération » qui relève de l’intox
Dans ce contexte, des médias proches de l’armée ont affirmé qu’une attaque avait été menée contre l’aéroport de Nyala, capitale du Sud-Darfour, avec la destruction d’un avion et la mort de combattants étrangers. Aucune preuve n’a été fournie.
Les Forces de soutien rapide (FSR) ont démenti catégoriquement ces allégations dans un communiqué publié le 9 août, les qualifiant de « propagande mensongère » destinée à masquer les revers militaires de l’armée, notamment au Kordofan.
Elles ont assuré que Nyala et ses infrastructures stratégiques restaient sous leur contrôle, protégées par des forces locales et un système de défense aérienne récemment renforcé.
Les FSR affirment puiser leur force dans « la détermination des Soudanais libres » qui, après des décennies de marginalisation, se battent pour un avenir fondé sur la liberté et la justice sociale, jusqu’à la chute « des dernières poches du régime déchu et de ses mercenaires ».
Une diversion pour échapper aux responsabilités
Pour de nombreux observateurs, ces campagnes de désinformation orchestrées par l’armée visent avant tout à détourner l’attention des violations commises et de la crise humanitaire.
Dans un communiqué, le ministère émirati des Affaires étrangères a également dénoncé ces accusations, y voyant une « tentative de bloquer les efforts de paix et d’échapper aux obligations morales, juridiques et humanitaires » pour mettre fin au conflit.
Abu Dhabi rappelle que la Cour internationale de justice de La Haye a rejeté la plainte déposée contre les Émirats, et que le rapport final du Groupe d’experts de l’ONU sur le Soudan, daté du 17 avril 2025, n’a trouvé aucun élément incriminant à leur encontre. Ces accusations, selon les Émirats, ne sont que « manœuvres médiatiques dérisoires destinées à dissimuler la responsabilité directe » des autorités soudanaises dans la prolongation d’une guerre qui dure depuis plus de deux ans et dans l’échec des initiatives de paix régionales et internationales.
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