Guerre économique : « Hexane, du pétrole dans nos assiettes » c’était une fake news !

Pendant plus d’un an, l’hexane a été présenté comme le symbole d’un scandale sanitaire majeur. Titres alarmistes, tribunes indignées et campagnes militantes ont imposé l’idée d’une contamination généralisée de l’alimentation par un solvant issu du pétrole. Pourtant, à mesure que les enquêtes techniques se sont accumulées, le récit initial s’est fissuré. Derrière l’alerte sanitaire, une autre réalité apparaît : celle d’une opération d’influence économique, où l’information devient un levier stratégique au service d’intérêts industriels concurrents.

Dangers de l’hexane : une narration anxiogène construite comme une arme informationnelle

L’hexane est un solvant autorisé par la réglementation européenne pour l’extraction des huiles végétales. Son usage est ancien, encadré et assorti de limites maximales de résidus. Malgré cela, à partir de 2024, une séquence médiatique coordonnée s’installe. Le vocabulaire change brutalement. Le terme technique disparaît au profit d’une formule choc : « du pétrole dans nos assiettes ».

Cette formule, reprise massivement, ne relève pas d’un hasard lexical. Elle active des ressorts émotionnels puissants et court-circuite l’analyse scientifique. Selon l’enquête publiée par UFC-Que Choisir le 26 décembre 2025, cette dramatisation repose sur des données fragiles et souvent sorties de leur contexte, tout en occultant les mécanismes réels de contrôle sanitaire. Or, dans une logique de guerre hybride, la première phase consiste à imposer un cadre narratif. Une fois ce cadre accepté par l’opinion publique, toute tentative de nuance est perçue comme une défense de l’indéfendable. Le débat cesse d’être scientifique pour devenir moral et politique.

Science instrumentalisée et conflits d’intérêts dissimulés

L’analyse des sources utilisées pour alimenter l’alerte révèle un point central. L’étude fondatrice de 2022, largement citée dans les médias et même lors d’auditions parlementaires, n’a pas été produite par des spécialistes de toxicologie ou de santé publique. Ses auteurs sont chimistes, spécialisés dans les procédés industriels.

Surtout, plusieurs d’entre eux entretenaient des liens directs avec Pennakem Europa, filiale du groupe Minafin, impliquée dans le développement d’un solvant concurrent de l’hexane, information confirmée par l’enquête de UFC-Que Choisir. L’un des auteurs venait même d’intégrer la direction recherche et développement du groupe au moment de la publication de l’étude.

Des résultats analytiques incohérents et non robustes

Les campagnes médiatiques ont affirmé une contamination massive des aliments. Pourtant, lorsque les résultats sont examinés en détail, les incohérences s’accumulent. Des analyses relayées par Radio France indiquaient la présence d’hexane dans des huiles d’olive et des produits biologiques, alors même que l’usage de ce solvant y est techniquement inutile ou réglementairement interdit.

Selon UFC-Que Choisir, ces résultats proviennent de méthodes non accréditées, présentées comme plus sensibles que les standards reconnus, mais jamais validées par un organisme indépendant. Des produits supposés exempts d’hexane apparaissent contaminés à des niveaux comparables à ceux issus de filières conventionnelles, ce qui suggère soit des pollutions accidentelles, soit des erreurs analytiques. À l’inverse, les tests menés par UFC-Que Choisir avec des laboratoires accrédités montrent une réalité bien différente. Sur plusieurs dizaines de produits analysés, la majorité ne présente aucune trace détectable d’hexane. Dans les rares cas positifs, les concentrations restent très inférieures aux limites réglementaires européennes.

L’EFSA comme levier de pression réglementaire

Un autre élément central du récit concerne la réévaluation du risque par l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Cette démarche a été présentée comme la preuve d’une urgence sanitaire reconnue par les institutions européennes. Or, l’enquête révèle que la saisine de l’EFSA n’est pas née d’une alerte interne, mais d’une demande formelle transmise à la Commission européenne par un cabinet d’avocats, agissant pour un industriel ayant déposé un dossier d’autorisation pour un solvant concurrent, explique l’UFC-Que Choisir.

Affirmer que l’hexane empoisonne massivement les consommateurs n’est pas étayé par les données disponibles. Les seuils réglementaires sont respectés, les contaminations ne sont ni systématiques ni corrélées de manière claire à l’usage industriel, et aucune crise sanitaire avérée n’a été démontrée. Nous sommes face à une opération d’influence sophistiquée, combinant science partielle, amplification médiatique et pression institutionnelle. Cette mécanique correspond parfaitement aux logiques contemporaines de la guerre hybride, où l’objectif n’est pas de mentir frontalement, mais de désorganiser la prise de décision.

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