Le snapback contre l’Iran : la riposte européenne pour freiner la bombe nucléaire

Depuis près de deux décennies, l’Iran avance dans un programme nucléaire dont la finalité militaire est régulièrement soupçonnée par les chancelleries occidentales. Les Européens ont choisi d’utiliser le snapback, outil juridique issu de l’accord de Vienne de 2015 (JCPOA), afin de rétablir automatiquement les sanctions des Nations unies. Derrière cette procédure complexe se joue un rapport de force global : dissuader Téhéran de franchir le seuil nucléaire, tout en évitant une confrontation armée directe.

Le snapback : une arme juridique dans l’arsenal diplomatique

Le snapback est une disposition unique du JCPOA. Prévu par la résolution 2231 du Conseil de sécurité, il permet à un État signataire d’alerter sur une violation majeure par l’Iran. Une fois activé, le mécanisme déclenche un compte à rebours de 30 jours. Si aucune résolution contraire n’est adoptée, toutes les anciennes sanctions onusiennes reprennent automatiquement effet.

Ces sanctions ne sont pas symboliques. Elles incluent l’embargo sur les armes conventionnelles, le gel d’avoirs financiers, l’interdiction de transactions bancaires internationales et des restrictions sur le programme balistique. En pratique, le snapback recrée l’isolement stratégique de l’Iran, en limitant son accès aux technologies duales indispensables à un programme nucléaire militaire.

Le mécanisme a été pensé comme une garantie ultime contre la mauvaise foi. Il contourne les blocages habituels au Conseil de sécurité et empêche tout jeu d’influence de Moscou ou Pékin. Autrement dit, il s’agit d’un « coupe-circuit » diplomatique : une fois enclenché, personne ne peut l’arrêter. D’où son surnom d’outil « sans veto ».

Où en est l’Iran dans son programme nucléaire ?

L’activation du snapback par la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne intervient alors que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a signalé des avancées inquiétantes. Téhéran a porté son stock d’uranium enrichi à 60 %, seuil critique pour une conversion rapide vers l’uranium de qualité militaire (90 %). Selon des experts occidentaux, ce niveau d’enrichissement place l’Iran à seulement quelques semaines d’une « capacité de percée » — c’est-à-dire la possibilité de produire suffisamment de matière fissile pour une première bombe.

Les responsables iraniens affirment que leur programme est strictement civil, destiné à la production d’énergie et à la recherche médicale. Mais la multiplication des centrifugeuses avancées IR-6 dans le site souterrain de Fordo, la réduction de la coopération avec l’AIEA et la suspension de certaines inspections après les frappes israéliennes de juillet 2025 renforcent les soupçons.

En parallèle, l’Iran a poursuivi ses efforts balistiques. Ses missiles Shahab-3 et Khorramshahr, testés à plusieurs reprises, disposent d’une portée allant jusqu’à 2 000 kilomètres, couvrant Israël, la Turquie et une partie de l’Europe du Sud-Est. Couplés à une éventuelle charge nucléaire, ils constitueraient un instrument de dissuasion stratégique majeur.

Un signal militaire et politique

Pour les Européens, l’activation du snapback n’est pas seulement une manœuvre diplomatique. C’est aussi un signal militaire clair. Dans le contexte de guerre ouverte entre Israël et l’Iran, il s’agit de réaffirmer une ligne rouge commune : pas de prolifération nucléaire supplémentaire au Moyen-Orient.

Paris, Londres et Berlin veulent aussi rappeler leur rôle central dans la sécurité internationale. Depuis le retrait américain du JCPOA en 2018, les Européens ont tenté de maintenir l’accord en vie. Mais face aux violations répétées, la patience diplomatique s’est épuisée. Le snapback représente donc une escalade calculée : pression maximale, mais toujours dans le cadre multilatéral onusien.

Côté iranien, la rhétorique est sans surprise. Le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi a qualifié la décision d’« injustifiée » et « sans base légale », promettant des contre-mesures. Mais Téhéran sait que l’isolement économique fragilise déjà son régime. La capacité à absorber un retour massif des sanctions reste incertaine.

Perspectives stratégiques

L’activation du snapback soulève deux scénarios possibles. Dans le premier, les 30 jours ouverts servent de levier pour relancer un dialogue minimal entre Européens et Iraniens, sous l’égide de l’ONU. Dans le second, l’absence de compromis entraîne la réimposition automatique des sanctions, renforçant l’isolement de l’Iran et accroissant les tensions régionales.

Pour les forces armées européennes et leurs partenaires de l’OTAN, l’enjeu est de surveiller les évolutions du programme nucléaire et balistique iranien. L’hypothèse d’une « percée » nucléaire rapide, combinée à la guerre actuelle contre Israël, rend le dossier explosif.

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